Dans ce recueil de nouvelles, on trouve une Blanche qui s’avère être noire (selon la loi de la seule goutte de sang noir) et qui subit le harcèlement d’enfants blancs, une fille vendue par son père, des esclaves, une jeune poète noire exhibée par son compagnon blanc dans une ambiance de lynchage… Mélange des genres et des époques, pères absents, agressifs ou prédateurs, toujours indignes, prostituées, femmes asservies, perdues, déboussolées, avec, sous-tendant les récits : l’extermination des Indiens, la rapine permanente, les viols et la tyrannie, la traîtrise, l’avidité sans frein.
Chanelle Benz écrit des nouvelles de haute volée qui déclinent toutes les teintes de la violence sur laquelle se sont bâtis les États-Unis, dans l’obsession de la race, à travers les armes et le crime, et détaille les mille et un visages de l’oppression des femmes.
Chacune de ces histoires est une gifle. Un coup plus ou moins fort, plus ou moins tordu, à l’image de toutes ces façons de raconter l’abus de pouvoir, la prédation, la peur, l’obscurité. Dans chaque nouvelle, une porte se ferme et le faible – femme ou enfant – se retrouve dehors, seul au monde, sans défense dans un univers désespérément vide et dénué de sens.
Kits Hilaire
Dans la grande violence de la joie de Chanelle Benz, Seuil 2018
Photo © Adèle O’Longh