Cet écœurant monument de racisme et de haine des femmes datant de 1967, dans lequel Iceberg Slim se vautre avec une insoutenable auto-complaisance, est tristement devenu culte. Petit manuel du parfait mac, il est récité par des batelées de tarés dans les universités nord-américaines et révéré par des seaux de rappeurs-commandeurs acharnés à glorifier leur vomitatoire animalisation des femmes. On trouve là l’une des origines de la morale de maquereau importée des États-Unis (avec son slogan phare : pétasse) qui a tout d’abord contaminé la production musicale avant d’infecter les marmailles d’aujourd’hui.
« – Écoute bien, pétasse, répondis-je, même quand ton cul merdeux sera mort et enterré, tu seras toujours une pute. Un de ces quatre matins, tu vas casser ta pipe et je te tirerai ma révérence en t’appelant la Demi-portion des cimetières. Je le sais bien, connasse, que tu es un être humain. Tu es un être humain tout noir qui sert de poubelle à ces connards de Blancs pour qu’ils puissent se vider les couilles. »
Sans commentaire. D’autant que les choix de traduction de ces sinistres mémoires de mac édulcorent le propos. Car non, dans ce contexte, le récurent kick her ass, leitmotiv de l’auteur à propos des femmes qu’il esclavagise, revenant toutes les 2 pages jusqu’à la nausée, ne signifie pas lui botter le cul ! Pourquoi ne pas traduire par : la défoncer, l’éclater, ou encore la déchirer, ou lui foutre une trempe ? Imagine-t-on les nuées de malfaisants du Gangsta Rap scander : Je vais te botter le cul ? Ou encore, à propos de cocaïne : Ce truc, ça botte le cul ? Non-sens !
Tant qu’à proposer une nouvelle édition de ce torchon, on aurait espéré un peu plus de rectitude. Mais sans doute est-ce là un domaine où l’éthique n’a pas droit de cité.
Pierre-Romain Valère
Pimp, Mémoires d’un maquereau, de Iceberg Slim, Point Poche 2018