Connu pour son livre Sukkwan Island, David Vann est un auteur extraordinaire qui mérite d’être plus largement découvert.
Dans ce dernier roman, Jim traîne après lui une grave dépression. Une saleté de maladie mentale. Les doutes n’en finissent pas de l’assaillir. La vie vaut-elle la peine d’être vécue ? Question évidemment banale mais à laquelle nul ne peut échapper. Jim pense que non. Il songe à se suicider, entraînant dans sa chute peut-être même ses enfants, ses parents… D’ailleurs le père de David Vann s’est suicidé quand il avait treize ans et le fils de Jim s’appelle David dans l’histoire… Pied de nez de la fiction ou autobiographie.
Jim balance entre courts moments d’euphorie et absence de désirs. Sans désirs, l’existence devient insoutenable. Il n’en peut plus de la routine et du quotidien de la vie, des échecs, des déceptions, de ses deux divorces, du fisc qui lui tombe dessus et aussi de ses migraines intolérables… Son frère Doug est chargé de l’épauler, de veiller à ce qu’il ne reste pas seul. qu’il n’ait pas d’arme à portée de main. Tous vont essayer de l’aider: son psy, ses parents, son frère, ses amis.
Cet état des lieux du désespoir, sans concession, poignant de bout en bout, révèle une écriture à la fois sensuelle, écho d’une musique durassienne, et rugueuse comme un Outrenoir de Soulages. On sort de là éprouvé, triste, tellement triste.
Francine Klajnberg
Un poisson sur la lune de David Vann, Gallmeister 2019
Photo © Pere Farré